Jour 14 : retour à la civilisation
Quelle joie de
se retrouver à la maison! Enfin presque, tant le fait de retrouver sa
petite tente, ses petites habitudes, le ruisseau et surtout les copains
redonne du moral.
La nuit à Nido a été réparatrice: 13 heures de sommeil d’une traite.
La descente jusqu’au camp de base a été destructrice: 2 heures de
marche avec des orteils gelés qui butent sur le bout des chaussures et une
jambe qui compense les efforts que l’autre ne peut plus faire ça
laisse des traces. Mais ces bobos ne sont rien face à l’accueil que
nous réservent Stéphane, Pierre-Yves, Bruno et Maria, une amie de Bruno.
Elle tombe bien Maria, d’abords parce que ça fait quelque temps que
la montagne ne nous avait pas gratifié d’une présence féminine et
ensuite parce que Maria est médecin. Elle a aussi officié comme
secouriste au camp de base de l’Aconcagua où elle a eu
l’occasion de se confronter à toutes sortes de pathologies, des plus
bénignes aux plus fatales. A mes yeux, son diagnostic a donc encore plus de
valeur: mes orteils durs et froids ont souffert mais ne tomberont pas, mes
douleurs au mollet sont dûes à une tendinite, voire à une déchirure
musculaire. Rien de grave donc, sauf que je ne vois pas comment je vais
faire les 45 km
qu’il reste à parcourir pour sortir du camp de base.
Le champagne me ramène à la réalité du moment et plus tard, une fondue
apportera sa contribution au chapitre "moral des troupes". Dans
la soirée, la solution à mes préoccupations est trouvée: je sortirai à dos
de mulet, ce qui fait beaucoup rire les copains. Je négocie la mule séance
tenante, mais personne ne veut me fixer le prix. Les "gauchos"
attendent de voir ce que nous aurons à troquer demain pour mieux déterminer
leur prix. De mon côté, je vends une laine polaire et des sachets de
nourriture lyophilisée à deux andinistes mexicains. J’offre ma
deuxième polaire à Bruno... avant de la lui réemprunter, car il fait froid
et je n'ai plus rien de chaud à me mettre.
Le lendemain, après avoir démonté le camp, chargé les mules, salué tout le
monde, je prends place sur le dos d’un mulet pour une
véritable partie de plaisir: 5 heures de petit trot sur un semblant de
selle en cuir. Au début, tout va bien. Cavaler dans la pampa avec un
gaucho, c’est grisant. Mais après quelques heures, les fesses
commencent à chauffer, les nerfs aussi. Impossible de mettre cette satanée
mule au galop! Alors je trotte, pour ne pas dire trottine. Comme j’ai
mal aux pieds, je ne peux pas m’appuyer sur mes étriers et je ramasse
tout sur les fesses et dans le bas du dos. Déjà blessé aux pieds et au
mollet, je me retrouve maintenant avec un dos et des fesses en compote.
Faites de la montagne, c’est génial!
A Puente del Inca je retrouve des copains hilares. Partis deux heures avant
moi, je n’aurai jamais réussi à les rattrapper. Retour à la case
départ. Une bière et un super lomo nous renvoient d’un seul
coup deux semaines en arrière. Ensuite, c’est un peu plus flou. Nous
sommes revenus à Mendoza, puis à Buenos Aires où nous avons fait la
fête… mais ça c’est une autre histoire.
P.S. Stéphane, on l’a vu, ne s’est jamais senti bien
lors des séjours à Nido. Fait étrange, alors que tout allait bien par la
suite, Stéphane a déclenché un oedème pulmonaire à son retour en Suisse, 5
jours après son dernier séjour en altitude.
|